Deg wass n 30 cutembar, immut azlawi Afransis, Athanase Vantchev de Thracy. Ijjen wezlawi d ameqqran, yura aṭṭas n idlisen s Tefransist. Netta iẓuran-nnes d Ibelgariyen. Mamec ttuɣa zeg iwdan yudrusen ittbeddan aked tseqqar n Imaziɣen d Irifiyen.
Min iɛna Athanase?
Ilul Athanase ass n 3 Yennayer deg useggʷas n 1940. Di temdint n Hoskovo, di Belgariya. Dag-s ig iḍfar tɣuri-nnes tamezwarut. Di temdint ssemɣaren zzag-s, idwel d anamur n waddur. Deg useggʷas n 1965, yeksi adiplum n Tfilulujit Tafransist di tesdawit n Sofiya, mamec netta issen Tagrikt, Talatint, Tarusit. Di tesdawit n de Veliko Tarnovo, temmewc-as tadukturt n waddur.
Deg useggʷas n 1966, iqqim izdeɣ di Paris, mani ttuɣa isafar deg umaḍal amen ikmel. Tuɣa yeqqar Tarusit di tesdawit n Inalco, iksi dag-s adiplum deg useggʷas n 1970. Mamec issulleɣ tɣuri-nnes di tsekla Tarusit di tesdawit n ssurbun.
Lexdayem-nnes
Netta ttuɣa-t d aselmad n tfilulujit deg waṭṭas n tesdawiyin, zzag-sent: Musku, Liningrad, Salamanki (Spaniya), Ruma, Urbinu (Iṭaliya), Atina (Agris) d Lund di Sswid). Yura ca n 58 idlisen n usefru, idlisen n umezruy n tẓuri, idlisen n iḥenjiren imezzyanen. Idlisen ttwassuɣlen ɣer xarebbi n yilsawen: Tabulgarit, Tarusit, Taspanyut, Taglinzit, Tamaziɣt, Taṭalyant, Tagrikt, Taburtuɣalit…
Netta s ixef-nnes issuɣel ca n 70 n udlis ɣer/zi tutlayt Tafransist. Idder tnayen issegusa di Dimaceq Mamek yedder di Ssaεudiya, Lmuɣrib, Lurdun, ɛawed ikka aberru n tmurt deg Wazya, Amrika talatint, Uruppa d Tefrikt.
Tuɣa-t d amɣar n umussu izlawiyen n umaḍal (poetas del Mundo), dag-s min ked imlussun aked izlawiyen Imaziɣen zzag-s i yura ca n tqessisin igga-asent awardi i Imaziɣen d Tmaziɣt.
D tina d ca zi tiqessisin-nnes i yura s Tefransist x Imaziɣen:
Taqessist x Lwalid Mimun
MON VILLAGE AMAZIGHE
A Mimoun El Walid
« Ayh’a x yinni ittum a dcar inu »
(« Honte à ceux qui ont oublié mon patelin »)
Mimoun El Walid
Non, je n’ai pas oublié notre pauvre patelin,
Ni les martyres qui meurent pour vivre avec l’éternité,
Ni les saints qui se dissolvent dans nos larmes pour devenir lumière,
Ni la chevelure dorée de notre souriante rivière
Où scintillent, plus rapide que l’éclair, les tribus joviales des poissons.
Non, je n’ai pas oublié notre pays immortel qui sent le géranium et le jasmin
Ni la grâce perpétuelle du sourire de mes amis !
Non, je n’ai pas oublié ma mère qui changeait
Les heures lourdes de peine en poèmes,
Les nécessiteuses années de mon enfance en cantiques,
Ni la suave sueur de mon père revenant exténué des champs,
Une fleur des prés à son oreille !
Je porte dans ma gorge ardente les minces ruisseaux de tant de chagrin,
Le vert, le bleu territoire inviolable de mon patelin
Avec ses frontières cicatrisées qui se marient si bien
Avec le vol fiévreux des fauvettes.
Non, je n’ai pas oublié les buissons de cactus ni le vent froid
Qui déchire sa tunique argentée à leurs rieuses épines.
Frère, mon frère, comme la tienne,
Ma tristesse va jusqu’aux arbres en fleurs
Et revient s’asseoir au seuil de ma maison abandonnée,
Là, où la main du jour laborieux ramasse les mots de mes ancêtres,
Grains de bonté et d’amour dissimulés sous les ruines de ma maison.
Non, je n’ai pas oublié les oiseaux fidèles à mon village,
Qui épellent, en poussant des cris mélancoliques,
Les noms abandonnées de mes morts endormis en Dieu.
Non, je n’ai pas oublié l’été solennel en habits d’or
Qui dépêchait sous les vétustes toitures des bâtisses les hirondelles,
Ses joyeuses messagères de joie, ses pages ruisselant de chaleur !
Non, je n’ai pas oublié Idir, le vieux, le clément, l’amène berger,
Pâtre assuré des brebis, gardien fidèle de ma langue amazighe,
Ma langue éternelle, belle comme une jeune mariée au visage rayonnant,
Douce comme le roucoulement amoureux d’un concile de colombes !
Non, je n’ai pas oublié les vastes mots d’amour de mes grand’mères
Ni l’antique sagesse de mes grand’pères assis à l’ombre frissonnante des platanes !
Je porte, cousues dans ma veste de tous les jours,
Les paroles de miel, les sourires de primevères
De mes tantes et oncles, de mes cousines et cousins !
Non, je n’ai pas oublié le temps abondant des moissons
Ni le peigne des étoiles dans mes boucles auburn d’enfant sage
Ni les voix vibrantes des jeunes filles de mon village,
Joyeuses envolées de tourterelles chantant autour du puits de mon village !
Non, je n’ai pas oublié les mâts blancs des sommets de mon Rif
Voyageant d’éternité en éternité
Ni les prairies bruissant d’herbe grasse et de marguerites
Où venaient poser leur mélodieuse fatigue les merles musiciens.
Frère, mon frère aimé, comme la tienne,
Ma pensée peut boire toute l’eau fraiche des fleuves et des lacs,
Toute la profondeur scripturaire de Dieu,
Toute la splendeur vertigineuse des Anges,
Mais jamais, au grand jamais,
Elle ne saura étancher ma soif de mon village !
Comme toi, frère de mon âme,
Que je me lève, ou que je me couche,
Que je pleure, ou que je ris,
Que je vis de larmes, ou que je me meurs d’affliction,
Je porterai, sculptés en lettres amazighes dans ma chair,
Tes mots magiques, frère, tes mots sacrés :
« Moi, je ne pourrais jamais oublié mon patelin
Quant à moi, je mourrai pour mon patelin. »
Athanase Vantchev de Thracy
Paris, le 3 novembre 2008
Glosse:
Mon jeune ami et poète, Andich Chahid, a eu l’amabilité de m’envoyer les paroles d’une chanson de Mimoun El Walid. J’ai été littéralement ensorcelé par le texte. J’y ai tout de suite reconnu la voix d’un grand poète. Pendant des jours et des jours, j’ai porté les mots de cette magnifique chanson dans mon cœur. Et j’ai décidé d’écrire, par amour pour mon ami Ali Khaddaoui, par tendresse pour Andich et tous mes amis amazighs, par pure admiration pour Mimoun Et Walid, cet extraordinaire chantre de la Tamazgha, ce poème, écho de sa célèbre chanson Honte à ceux qui ont oublié mon patelin.
Taqessist x Qadi Qeddur
DEVOTION AMAZIGHE
(’ευσÝβεια)
A Cadi Kaddour
« Il n’est pas d’homme plus pauvre que celui
qui ne laisse aucune trace de sa vie »
Sagesse antique
Je pense à toi, Ami immortel,
Pieds nus dans l’herbe frissonnant
Sous l’aimable fraicheur du soir rifain.
Ce soir ensorcelant
Resté si longtemps clair
A la demande d’une âme innocente,
A l’invocation d’un cœur pur
Qui veut que la lumière de l’amour
Se prolonge à l’infini !
Je pense à toi, Kaddour,
A toi, frère des oiseaux libres,
A toi, ami du Verbe, mort par dévotion
Pour la langue superbe de tes ancêtres.
Les fleurs n’osent plus déranger
Ton ombre qui dort dans les soyeux replis
Du temps solennel !
Un petit froid parcourt les calices des jasmins,
Non celui que souffle la bouche glacée de l’hiver
Qu’ils connaissent si bien,
Mais un froid dense, profond, intérieur qui les fait
Se figer d’effroi !
Endormi dans les bras de l’éternité,
Tu occupes tant de place à présent
Dans le cœur probe de ton peuple,
Tant d’espace dans les paysages enchanteurs de ton pays
Si chers à tes yeux d’adolescent !
Depuis ton soudain départ
Le temps s’est arrêté
Sur les cimes aériennes des montagnes,
Sur les odorants sentiers rifains fuyant
Vers les vallées ondoyantes,
Sur le seuil de ton humble,
De ta chaste demeure !
Imperceptiblement, délicatement l’or
Amoureux du savoir,
Travaillé par les mains dévotieuses de ton âme,
S’est transformé en statue de déesse !
Kaddour, mon vénérable Ami, tu as prouvé
Aux hommes dela Terreque
De n’importe où on peut s’élancer vers le ciel !
Toi qui as partagé ton cœur en deux
Et l’as élevé vers le firmament vêtu d’une neuve lumière.
Toi, seul, debout, doux, souriant
Face à toute la transparence de l’avenir !
Oui, tout est divin, mon Ami,
Pour ceux qui sont faits de clarté,
Cela l’est,
Cela l’a toujours été !
Athanase Vantchev de Thracy
Paris, le 12 décembre 2008
Glosse :
Cadi Kaddour (mort en 1995) : éminent linguiste amazighe (Maroc). En 1990, il soutint, à Paris, sa thèse de doctorat d’Etat Transitivité et diathèse en tarifit, analyse de quelques relations de dépendances lexicale et syntaxique. Kaddour périt lors d’un accident de la route, le mardi 12 septembre 1995, laissant derrière lui plusieurs ouvrages consacrés à sa langue maternelle, la tamazight. Il est un des premiers à croire que cette langue vieille de plusieurs siècles et la culture qu’elle véhicule finira par trouver une place digne parmi les langues du monde. Il lui consacra toute sa vie, tout son amour, tout son enthousiasme. Les jeunes générations amazighes (berbères) lui vouent un véritable culte.
Taqessist x Andic Cahid
REVERIES RIFAINES
« Ma terre est une lettre »
Andich Chahid Idir
I.
Le ciel étend son voile à semis de fleurs
Sur les somptueux cèdres du Rif.
Ta peau est suave
Comme la chair des fraises sauvages des fourrés,
Tu ris, et toute la beauté du monde
Est dans les ruisseaux verts de tes yeux !
II.
Ces visages de femmes amazighes
Plus doux que des poèmes de satins légers.
Leurs mains d’ivoire d’autrefois,
Lumineuses
Dans la grande quiétude de leur silence.
III.
La démarche élégante des jeunes filles
Des hautes montagnes,
Cette odeur enivrante de violettes –
Lettres fines du tifinagh
Leur rire diaphane !
IV.
Andich vient avec le soir
En tunique blanche cousue
Par les cantilènes des abeilles,
Brodée par les brises du Rif !
Son cœur est grand et pur
Comme la face de l’éternelle Tamazgha !
V.
Ici la beauté est dans toutes les prunelles
Des adolescents !
L’automne et ses jours de belles ordonnances
Baignent leur beauté fulgurante,
Leurs hanches minces et souples,
Leur poitrine de marbre blanc du Rif.
VI.
Dans ce pays magique,Dans les plis de ses montagnes majestueusesLes draps sentent le pin et la mentheMaisons ouvertesComme des ailes de colombesDans la molle sérénité du soir.
VII.
La houle de la mer dans la bouche de Massin,
Les heures sont douces comme des fruits !
Ses lèvres n’ont pas assez de baisers
Pour couvrir de leur tendresse vertigineuse
Ce pays qu’il aime à mourir.
VIII.
La récitation sillante des rouges-gorges le matin,
Le parfum de thé et de paroles aimantes,
La rose décence des sentiers et des champs,
L’abime immobile des lits
Où dorment des enfants
Plus beaux que la lumière de l’aurore.
IX.
La moiteur des corps presque nus des paysans,
Leurs têtes antiques qui rappellent
Massinissa et Jugurtha !
Des chevelures couleur de vin, poitrines de cuivre
Embrassées par le vent doré de midi !
Ô Andiche, comme est douce à mon chant
Cette impression d’éternité
Dans leurs regards !
X.
Idir, mon frère aimé,
Ecoute le synode serein des passereaux,
Oublie un instant la signée des nuits,
Le temps et ses boucles perlées de résine de sapin,
Les rumeurs de l’argile, les odes des étoiles du Rif !
Couche-toi sur l’herbe molle des prairies
Et écoute, écoute sans pleurer,
Les suaves battements
Du cœur immortel de ta Patrie!
Athanase Vantchev de Thracy
Paris, ce mercredi 5 novembre 2008
Glosse:
J’ai écrit ce poème en pensant au jeune poète amazighe Andich. Massin est un prénom rifain.